Merci
Voici la fin de ce que j'ai écrit, après il faudrait que je me replonge dedans...
Galaan sorti prendre l’air. Malgré tout ce qu’il pouvait dire à Niena, cette attente qui se prolongeait le rendait nerveux. Il inspira un grand coup, humant les parfums du soir, puis il s’assit sur une branche d’arbre basse et observa la ville au loin. Que ce monde semblait paisible ! Qui pouvait croire que par delà ce grand mur de pierres la guerre faisait rage, que des batailles plus sanglantes les unes que les autres étaient le lot quotidien de milliers de soldats, de profession ou recrutés en urgence il y a peu. Ici, la vie était tranquille. Bien sur, il ne fallait pas sortir dans la nuit, car le risque de rencontrer les corbeaux du Sage étaient grands. Ces oiseaux, certes grands, ne présentaient pas de danger en soi, mais la menace qui planait autours d’eau suffisait. On aurait pu les comparer à des chiens de garde, sauf qu’ils ne gardaient pas le château mais bien les habitants. Bien entendu, la majorité des gens de Shnadé n’avaient rien à craindre. Jamais ils ne se seraient aventurés au delà du mur. Jamais ils n’auraient trahi le grand Sage. En réalité cette idée ne s’était même probablement jamais présentée à leur esprit. Mais pour ceux qui avaient quelque chose à cacher, pour les rares personnes qui n’étaient pas nées à Shnadé, ceux-là même qui y étaient venus pour trouver bonheur et richesse, eux pouvaient trembler. Parce que c’est eux que les rapaces observaient en silence.
L’homme frissonna et décida qu’il était temps de rentrer. Malgré qu’il n’avait aucune envie de dormir, il sentait qu’il avait besoin de prendre le maximum de forces pour le voyage qui arrivait. Il embrassa Niena sur le front qui, calée dans un fauteuil, un bouquin à la main, lui souhaita bonne nuit avec un sourire qu’elle essayait sincère. Quand il fut hors de sa vue, la jeune femme ferma le livre d’un coup sec et l’abandonna dans le fauteuil. Elle s’assit à la longue table en bois de la cuisine et sorti pour la nième fois les plans de sa poche. Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète de son manque de sommeil ou de son stress, c’est pourquoi elle ne l’avait pas fait devant lui. Les papiers qu’elle posa devant elle étaient vieux, jaunis, usés par les années. Les cartes qui y étaient dessinées à l’encre de chine semblaient grisâtres, certaines parties étaient quasi illisibles. Mais elle les connaissait par cœur, mieux que quiconque, puisque c’était elle qui les avait tracées, un beau jour d’automne, accompagnée de Takano. Ils étaient dans les ruines de Kilash, attenantes au château, où elle vivait à cette époque. Il lui avait fait remarqué sa grande précision quand elle dessinait, puis l’idée leur était venue de dessiner une carte du village.
- Après tout, avait dit Takano, ce n’est pas très grand, et ca fera un bon exercice pour toi.
Elle avait protesté en rigolant et ils s’étaient mis en route. Main dans la main, ce jour-là, ils se sentaient invisibles. Ca avait été la dernière fois qu’ils s’étaient vus. Le lendemain, un mage qui se faisait passer pour Sage, du nom de Fenesyn balaya le village d’un coup de magie plus que douteuse, installa ses quartiers dans le château, tuant ses habitants sans ménagement, en particulier Kelin, chef du village, tant respecté. Se faisant, il s’était approprié les terres et les villageois sans que personne ne puisse rien y faire. Niena et Takano avaient observé la scène depuis les ruines. Abasourdis, soudain sans patrie, ils ne purent que prendre la fuite. Fenesyn étendit sa conquête aux villes voisines. Son véritable objectif étaient évidemment Trakna, qui était la capitale du pays. Elle n’était qu’à quelques semaines de marches de Kilash, et sa cible se rapprochant, la haine de Fenesyn ne faisait que grandir. Les deux adolescents étaient arrivée après plusieurs jours de marche à la porte de Shnadé, exténués, couverts de blessures. Si un garde n’était pas passé par là à ce moment là, ils seraient sans doute morts de soif. Ledit garde les avait traînés à l’intérieur des murs et les avait fait emprisonnés. Finalement libérés cinq jours plus tard en échange de mettre par écrit ce qu’ils avaient vu à Kilash, ils se retrouvèrent en pleine ville, sans rien. Pas de sous, pas de nourriture, personne de leur connaissance. Rien.
La jeune femme s’était endormie sur la table en repensant à Takano. La lune brillait, haute dans le ciel, sans doute les habitants de Kilash la voyaient eux aussi.
Chapitre 3 :Timmy se retourna dans son lit. Les gros chiffres lumineux de son réveil indiquaient 5 :18 mais la lumière filtrait déjà à travers les rideaux, même si le soleil ne se lèverait pas avant deux bonnes heures. Le sommeil ne revenait pas. Troublé, il s’était réveillé en sursaut, tout en sueur, d’un rêve qui ne lui revenait que par bribes incompréhensibles. Une histoire de chevaux, de clés, de coffres, quelque chose qui ressemblait à du Walt Disney qui aurait tourné à l’horreur. N’y tenant plus, il finit par se lever. Au moment où il posa le pied sur le sol, un sentiment de malaise le saisit et ne le lâcha plus de la journée. Il se prépara sans bruit, la douche serait pour au soir. En aucun cas il ne voulait réveiller son père. Il n’avait pas eu de coup depuis près de trois jour, Dieu merci, et il ne voulait surtout pas que cela recommence. Il se glissa furtivement à travers la maison silencieuse et fit un arrêt rapide dans la cuisine, non pas qu’il ait eu faim, mais sa mère cachait souvent de l’argent dans la grosse soupière sur le buffet. Et de fait, il y trouva un sacré butin. Il ne prit que le strict minimum pour ne pas se faire repérer et, enfilant un pull, il quitta la maison.
L’air était frais mais on sentait déjà que la journée serait écrasante de chaleur, tout comme chaque jour de ces dernières semaines. « La terre ne semble pas tourner très rond », pensa le garçon, sans vraiment savoir la véracité du propos qu’il venait d’énoncer. Il arriva au bout du sentier et s’arrêta quelques secondes pour observer le petit morceau de terre qu’il considérait comme son potager. Il en était fier. Il avait reçu ce privilège lors de son dernier anniversaire, pour ses 14 ans. Ainsi depuis quatre mois, il avait entrepris de planter ses propres légumes et les voyait pousser. A dire vrai, cela l’apaisait de venir ici. Il ne sentait plus l’oppression et la haine des autres à son égard. Parce qu’il ne leur plaisait pas. Parce qu’il était différent. Pourtant, ses différences, si infimes mais tellement grandes en même temps, n’étaient pas réellement visibles à l’œil nu. « Seuls les vrais passeurs savent voir qui tu es et ce que tu vaut rien qu’en te regardant », avait dit l’homme dans son rêve, cette nuit. Mais un passeur, c’est quoi ? Sur le chemin de terre qui menait à la route (la vraie), Timmy eut tout le loisir de regarder le lever du soleil. Quelque fut le nombre de fois qu’il avait observé ce spectacle, il le savourait avec toujours autant de bonheur. Il passa outre l’arrêt de bus, à cette heure-ci ils ne roulaient pas encore – enfin, pas chez lui en tous cas. Peut-être qu’en ville, les bus ont déjà fait la moitié de leur journée et que l’agitation bat son plein. Mais au beau milieu de sa campagne, pour l’instant seuls les oiseaux accompagnaient son chemin.
Il arriva au centre du village une bonne demi-heure plus tard. On sentait l’agitation monter dans les habitations, les bêtes au dehors s’impatientaient. Des chiens aboyaient dans une arrière-cour pour réclamer leur repas. Des chats bondissaient à son passages et s’enfuyaient en feulant – plus pour le plaisir probablement, que par réelle peur. Il repensa à son rêve. La clef qu’il détenait alors lui semblait la plus étrange et, en même temps, l’élément le plus important. « Les rêves sont sources de réponses, quand ta journée est source de questions » lui avait dit une fois son grand-père. Il n’aimait pas cet homme dur et sans loi, mais cette remarque était probablement la seule chose qu’il lui ait laissé. Un coffre. Un simple coffre de bois. Cela faisait des lustres qu’il n’avait pas vu de coffre semblable. Le dernier avait été dans le grenier chez Sam quand ils s’étaient essayé à une séance de spiritisme, laquelle n’eut jamais lieu, sa mère les ayant découverts et hurlé à qui voulait l’entendre qu’ils n’appelleraient que démons et enfers. Et puis cet homme, qui lui tendait la clef, et cette phrase : seuls les…
- Hé fais attention ! L’homme auquel il s’était heurté beugla comme un veau. C’en est-y pas des manières ! J’m’en vais t’apprendre tes leçons d’vie moi m’garçon ! Timmy regarda l’homme s’éloigner, ahuri, il ne l’avait absolument pas vu arriver.
IL rejoignit un petit parc bien aménagé à la limite du village et s’assit sur un banc pour réfléchir. Ce rêve l’avait tellement perturbé qu’il avait même oublié de prendre son cartable avec lui. Mais en réalité, il en oublia même son devoir d’écolier. Il ne pensait qu’à son rêve.
A quelques mètres de lui, un vieillard contait une histoire à un groupe de jeunes enfant qui buvaient ses paroles, émerveillés par les mots, le regard brillant, parfois effrayés par les monstres, mais toujours rassurés à l’arrivée du héro. « L’école a déjà commencé », pensa Timmy. Il s’approcha du groupe et s’assit non loin pour écouter. Après tout il n’avait rien d’autre à faire.
« … La femme prit alors le papier soigneusement plié et lu les mots magiques. Arenum sacrena tar nomenia. Et elle prit la clef et le coffre s’ouvrit alors sous les yeux ébahit des jeunes gens présents. Dans le coffre se trouvait le plus beau trésor qu’elle eut jamais vu. Le passeur prononça alors ces mots : Heureux sont ceux qui rêvent, car avec eux arrivent les réponses.
Timmy resta bouche bée, pétrifié sur son banc.
« Et qu’est ce qu’il y avait dans le coffre ? » s’écria un môme.
« C’est à toi de le découvrir, Timmy » dit le vieux en fixant le jeune garçon, toujours bouche ouverte et yeux hagard, assis sur son banc à l’écart. Son cœur semblait s’être arrêté de battre. Comment connaissait-il son prénom ? Pourquoi lui avoir adressé la parole ? Et surtout, qu’est ce que tout ceci signifiait ? Les enfants, rappelés par leur maîtresse restée non loin, firent un rang convenable et retournèrent vers l’école. Le quart d’heure histoire était passé, au boulot à présent.
Timmy s’approcha du vieillard, vacillant sur ses jambes, la bouche sèche.
« Qu’est-ce qu’un passeur ? » demanda-t-il.
« C’est celui qui te donnera la clef, Timmy. Tu ne dois pas oublier la clef et rappelle-toi que les rêves sont toujours les réponses. Découvre l’intérieur du coffre, Timmy . »
« Je ne comprends rien », dit le garçon, dont les tempes commençaient à lui renvoyer l’écho désordonné de son cœur.
« Ouvre les yeux et tu verras. Respire et tu sentiras. Avance et tu trouveras ».
Le vieil homme sembla alors tomber dans un sommeil profond et tous les cris et les injures du garçon ne le réveillèrent pas.
Il se balada en ville, sans but précis, marchant là où ses jambes le menaient. Des pensées incohérentes se bousculaient dans sa tête. Toute cette histoire semblait tellement irréelle, l’avait-il seulement vécue ? Il se demanda, l’espace d’un instant, si tous les boulons tenant en ordre son esprit ne venaient pas de sauter brusquement. Quelle autre explication y aurait-il à ce rêve sans queue ni tête, ce vieillard sénile qui lui parle de clef et de coffre ? Cette collante impression de fouler ces trottoirs pour la dernière fois. Il s’arrêta net, l’air sentait bon le pain chaud et les gaufres, et à cet instant il réalisa qu’il était affamé. Il devait être plus de 10 heures trente et il n’avait rien avalé depuis la veille au soir, la mauvaise soupe trop claire que sa mère avait servi. Il sorti quelques pièces de sa poche et, se léchant les babines à l’avance, s’apprêta à commander une gaufre chaude. Il fut coupé net dans son élan et failli lâcher son argent. Devant lui scintillait la lumineuse pancarte qui nommait l’échoppe : La porte de Shnadé : gaufres et pâtisseries en tous genres. Il sentit son sang se glacer, sa tête se mit à bourdonner et ses jambes se dérobèrent sous lui. Il s’affala lourdement sur le sol trop dur.
Quand il revint à lui, il était dans l’arrière-boutique du magasin. Le gérant, un type moyen, d’age moyen, d’aspect moyen, tout ce que l’on pouvait trouver de plus moyen, lui présenta un verre d’eau.
« Eh bien petit, tu te sens mieux ? Tu nous as fichu une sacrée frousse »
Timmy regarda autours de lui. La pièce était exiguë, remplie de caisses ouvertes ou scellées, des piles de papiers s’empilaient des les coins, et des araignées y trouvaient leur paradis. On l’avait couché tant bien que mal sur un fauteuil usé dont on ne distinguait même plus le motif. Il allait probablement s’écrouler sous son poids et il serait bon pour l’hosto cette fois. Mais non, le fauteuil tient bon. Dans un horrible grincement de fer trouillé et de ressort détendus, il parvint à s’asseoir.
« Tu semblait avoir faim et puis tout d’un coup, POM tu t’es évanouis », continua le type. « Tu veux manger quelque chose ? »
Timmy acquiesça, lui acheta une gaufre et sorti, titubant encore. Pourquoi diable avait-il fait cela ? Qu’est ce qui l’avait perturbé ? Avait il si faim ? Une fois sur le trottoir d’en face, la gaufre bien chaude dans une main, il s’autorisa à regarder l’enseigne à nouveau.
« La porte de Shnadé, qui c’est celle la ? » maugréa t il. Il lui semblait connaître ce mot, sans vraiment le connaître, comme l’impression que laisse un rêve quand on l’oublie en se réveillant… Les réves sont les réponses… Il finit son repas et repris sa route.